La réanimation du nouveau-né au centre de la troisième journée de la Conférence des sages-femmes d’Afrique francophone à Nouakchott

3ème journée rencontre des sages-femmes d'Afrique francophone

CONF SAGES FEMMES3

La 1ère Conférence scientifique de la Fédération des Association des Sages-femmes d’Afrique francophone s’est poursuivie le jeudi 19 septembre 2024 au Palais des Congrès de Nouakchott avec plusieurs panélistes. Au centre des débats, la réanimation du nouveau-né, l’une des principales causes de la mortalité néonatale dans l’espace subsaharien.

Ouverte le mardi 17 septembre 2024 sous le haut patronage de la Première Dame, Mme Marième Mint Mohamed Fadel Dah, en présence du Ministre de la Santé, Dr. Abdallah Ould Weddih, du Directeur régional du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre (23 pays), Dr. Sénnen Hounton, de la Représentante Résidente de l’UNFPA en Mauritanie, Dr. Olga Sankara et de plusieurs présidentes et membres d’associations de sages-femmes venues de plusieurs pays de l’espace francophone africain, la 1ère Conférence scientifique des Associations de Sages-femmes s’est poursuivie pour la 3ème journée consécutive le 19 septembre 2024 avec la tenue de plusieurs panels.

Au centre des débats, la santé de la mère et de l’enfant, notamment l’allaitement maternel exclusif et la santé du nouveau-né.

Les femmes subsahariennes ne donnent pas assez le sein à leur bébé

Animant le premier débat sur l’allaitement maternel exclusif pendant les six premiers mois de la vie du bébé, Mme Mouna, professeur mauritanienne de pédiatrie a affirmé que le plus grand défi qui se pose au niveau des maternités en Mauritanie, « c’est l’infection et ses risques sur les décès maternels et néonataux. »

Minimisant le taux des prématurés dans le pays et le fait que seulement 40% des nourrissons en Afrique de l’Ouest et du Centre reçoivent leur première tétée à moins d’une heure de leur naissance (source : https://www.selfrance.org/actualites/details/allaitement-maternel-developpement/), Mme Mouna a affirmé que le taux d’allaitement dans la région reste faible par rapport aux 80% dans les pays développés. Elle a souligné l’importance de la Prise En Charge (PEC) précoce des nouveau-nés et des mères tout en préconisant la création d’unités spécialisées en pédiatrie.

Le Niger a par la suite fait une présentation sur les résultats d’une étude intitulée « Connaissances, attitudes et pratiques de réanimation néonatale par le personnel paramédical de la Communauté Urbaine de Niamey ». 

La réanimation néonatale, une urgence médicale mal maîtrisée

Citant une étude réalisée en 2022 sur six mois dans les six plus grandes maternités de Niamey, l’intervenante du Niger a affirmé que 10% des nouveau-nés ont besoin d’une assistance à la naissance, dont 3% des 120 millions nés dans les pays en développement. Au Niger, précise-t-elle, le taux de mortalité néonatale est passé de 24/1.000 en 2015 à 43/1.000 aujourd’hui.

Elle a pointé du doigt l’absence chez les sages-femmes de la connaissance des techniques de réanimation néonatale. Ainsi, selon elle, 63% du personnel de santé interrogé, infirmiers et sages-femmes, ne connaissent pas le Score d’Apgar ni le temps minimum pour la réanimation du nouveau-né.

Mieux, la panéliste du Niger souligne que 68% parmi le personnel interrogé n’avaient pas bénéficié d’un renforcement de capacités dans ce domaine. Seulement, plus de 73% maîtrisent les fréquences respiratoires, mais il n’y a que 31% qui savent comment chercher le tonus du nouveau-né, et 80% ne maîtrisent pas la pratique de la respiration artificielle.

De ces résultats sont sorties, selon elle, des recommandations portant sur la mise en œuvre d’un plan de renforcement de capacité du personnel médical au niveau des maternités, tellement l’étude a montré la faible connaissance du personnel soignant dans le domaine de la réanimation du nouveau-né.

Partogramme et CGTA

Mme Awa Diallo, panéliste et présidente de l’Association des sages-femmes de Côte d’Ivoire a abordé dans sa communication le partogramme de l’OMS et ses deux lignes transversales, la ligne d’alerte et la ligne d’action. Elle a affirmé que 830 femmes dans le monde meurent chaque jour pour des complications liées à l’accouchement ou à la grossesse. En Côte d’Ivoire, souligne-t-elle en substance, le taux de mortalité maternelle est passé de 614 à 385 décès pour 100.000 naissances vivantes.

Egrenant toujours ses chiffres, elle précise que le taux d’accouchement assisté en Côte d’Ivoire est de 84% et qu’en 2023, son pays a adopté un nouveau-guide dénommé le CGTA (guide de travail d’accouchement de l’OMS) ou nouvelle version du partogramme qui prendrait plus en compte l’aspect humain et qui est en cours de dissémination dans les systèmes de santé, en particulier dans les pays d’Afrique francophone.

Plusieurs intervenantes, au cours de la session question-réponse ont soulevé des aspects liés à la survie des nouveau-nés et la nécessité d’un plan de suivi des patientes. Ainsi, Mme Fatimetou Mint Moulaye, présidente des Sages-femmes de Mauritanie a affirmé que le partogramme est un outil indispensable dans le suivi de la santé de la mère et du nouveau-né, en tant que tableau de bord de la sage-femme. Elle a toutefois plaidé pour la mise en place d’un protocole national harmonisé pour que toutes les sages-femmes s’alignent aux mêmes procédures et servent la même médicamentation.

Une intervenante du Burkina Faso trouve que son pays est en avance par rapport à l’utilisation du partogramme qui est remplacé selon elle par le CGTA au niveau de toutes les structures de santé, car le guide prend en compte l’aspect humain dans le traitement des patientes.

D’autres ont abordé le temps limite de réanimation du nouveau-né qui serait circonscrit aux premières 20 minutes et surtout la minute d’or qui vise à normaliser une série de procédures, immédiatement après la naissance, afin de gérer les secondes critiques pour la survie immédiate et à long terme du nouveau-né

D’ailleurs, Pr. Mouna dira que pour la réanimation du nouveau-né, ce n'est pas une affaire de minutes, mais de secondes. Elle a précisé que le temps de réanimation peut se prolonger jusqu’à 40 minutes, d’où le conseil qu’elle donne aux sages-femmes pour qu’elle ne déclare pas trop vite le décès du nouveau-né. Elle a précisé que les protocoles de réanimation sont régulièrement mis à jour par l’Académie américaine de pédiatrie, un protocole copié par les Européens et que les pays du Sud recopient à leur tour.

Cheikh Aïdara