Levée de l’immunité du député Birame Dah Abeid, l’Assemblée Nationale confirme son statut de gendarme de l’Exécutif

levée de l'immujnité parlementaire de Birame Dah Abeid

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Pour la énième fois, l’Assemblée Nationale, et à sa tête le général Mohamed Ould Meguet, confirme son rôle de gendarme dévoué de l’Exécutif. Avec la levée de l’immunité parlementaire du député et président du mouvement IRA, Birame Dah Abeid, sur la demande du ministre de la Justice, le régime de Ghazouani semble vouloir s’inspirer du président sénégalais Macky Sall qui a mis en prison son principal opposant Ousmane Sonko.

Le bureau de l’Assemblée nationale approuve la levée de l’immunité du député Biram Dah Abeid

Il y a juste quelques mois, le député Mohamed Bouya Mohamed Vadel, a été dépouillé de son immunité parlementaire pour avoir caricaturé le président Ghazouani aux détours d’une parodie imaginaire. Présenté devant le Parquet, il est déposé en prison et n’a dû son salut que par miracle. Depuis, les députés de l’Assemblée Nationale vivent sous le couperet de poursuites et de coercitions pour annihiler toute volonté de critique à l’égard des membres du gouvernement qui défilent désormais au-devant de l’hémicycle en terrain conquis.

Aujourd’hui, c’est au tour du député Birame Dah Abeid de subir la guillotine d’un Parlement vidé de son sens, soumis au diktat d’un général d’armée à la retraite et d’une majorité aux ordres. La Chambre des députés en Mauritanie est devenue un simple outil de répression des opposants entre les mains de l’Exécutif.

Le processus en cours découle d’une plainte déposée par le président de l’Union des Forces du Progrès (UFP) Mohamed Ould Maouloud. Certaines voix parlent de plainte sous-traitée par le pouvoir en place, pour barrer le chemin à l’un de ses plus redoutables adversaires, à l’heure où la popularité du président actuel est en chute libre, à cause d’une accumulation d’échecs et de contreperformances, traits marquant de son premier mandat finissant.

D’autre part, le dernier accord sur la migration, conclu entre l’Union européenne et la Mauritanie, est considéré par la rue mauritanienne comme une trahison, car il va transformer le pays en terre de concentration des migrants de tous horizons, refoulés des rives européennes. Ce tollé d’une telle ampleur qui sourd des tréfonds de l’opinion nationale fait vaciller le pouvoir. Un évènement, tel l’emprisonnement d’un opposant de l’envergure de Birame Dah Abeid pourrait en effet occuper les esprits, le temps de faire oublier une telle traitrise, selon certaines analyses.

Autre diversion pour cacher l’incurie d’un pouvoir qui s’achève par un actif zéro réalisation et un taux galopant de corruption, la cooptation de Ghazouani à la tête de l’Union africaine, fêtée jusqu’à la lie, comme s’il venait de remporter la coupe d’Afrique du meilleur Président de la République. Il faut rappeler juste que ces mêmes foules en délire avaient fait pareil lorsque Mohamed Abdel Aziz fut coopté comme président de cette même instance.

S’ajoute à tout cela, l’envie d’un pouvoir, dérangé jusque dans ses derniers retranchements, d’en finir avec un homme dont la popularité et les attaques sans arrêt mettent à nu ses nombreuses défaillances. Les évènements récents à Rkiz, sont restés particulièrement au travers de la gorge d’un régime qui a fait de l’émergence des forces féodalo-tribales un levier pour sa mainmise sur les masses déshéritées. L’éclatante victoire arrachée par les populations d’ascendance servile à Rkiz, grâce à l’appui du mouvement IRA et à son président, constitue en effet un camouflet impardonnable pour la classe féodale représentée jusqu’au sommet de l’Etat. Un affront qu’il faut laver par l’emprisonnement de cet « esclave rebel ».

Ainsi, cette décision rapide de lever l’immunité parlementaire de Birame Dah Abeid prise par le Bureau de l’Assemblée Nationale, dont la majorité est d’ailleurs sous la coupole du régime en place, confirme une fois de plus le déséquilibre constaté entre les différents pouvoirs constitutionnels, et cela, depuis la naissance de la pseudo démocratie mauritanienne dans les années 90.

Pire, cette décision met à nu la volonté affichée du pouvoir en Mauritanie d’engager un dialogue apaisé entre les acteurs politiques pour mettre fin aux tensions nées des dernières élections générales largement entachées de fraudes, selon l’opposition et une grande partie de la majorité.

Cette décision risque enfin, de mettre la poudre au feu dans une Mauritanie en bute à une longue crise sociale, exacerbée par l’accumulation d’injustices qui n’ont épargné aucune communauté ni aucun secteur de la vie sociale et économique du pays.

Il faut juste rappeler que Birame Dah Abeid a été élu pour la première fois député à l’Assemblée nationale en 2018, à partir d’une cellule de prison. De 11.000 voix récoltées lors de la présidentielle de 2014, il reçut plus de 23.000 voix lors des législtaives et municipaux de 2018 et plus de 70.000 lors des dernières élections générales de 2023 où non seulement, il fut réelu, mais fit élire en même temps comme députés trois femmes membres du mouvement IRA. Lors de la présidentielle de 2019 face à Ghazouani, il avait occupé la deuxième place avec plus de 200.000 voix . Avec son emprisonnement planifié, il se peut qu’il ne quitte sa cellule que pour renter à la Présidence de la République.

Cheikh Aïdara (Opinion)

 Le bureau de l’Assemblée nationale approuve la levée de l’immunité du député Biram Dah Abeid

Madar - Mardi, le bureau de l’Assemblée nationale mauritanienne a approuvé la levée de l’immunité du député du parti Sawab, Biram Dah Abeid. 
Cela s’est passé lors d’une séance tenue par le Parlement ce mardi soir, à la demande du ministère mauritanien de la Justice.
Cette décision intervient quelques jours après le dépôt d’une plainte par le chef du parti de l’Union des forces du progrès, Mohamed Mouloud, contre Biram Dah Abeid pour diffamation et abus.
Ould Abeid avait parlé dans un clip vidéo du soutien que Ould Mouloud a reçu lors de la campagne électorale présidentielle passée de la part de l’homme d’affaires Mohamed Bouamatou.